sábado, 21 de março de 2009

O juiz de instrução na França

Prof Farlei Martins envia a seguinte notícia:




Le Monde, 21.03.2009

La mort programmée du juge d'instruction, par Robert Badinter


Lors de la rentrée solennelle de la Cour de cassation, en janvier, l'oukase
présidentiel est tombé. C'en est fini du juge d'instruction, ce vétéran de
l'époque napoléonienne. Le temps est venu du juge de l'instruction, ce
magistrat du XXIe siècle "qui contrôlera le déroulement des enquêtes mais ne
les dirigera plus".


L'annonce a pris de court tous ceux qui oeuvrent à la réalisation des "pôles
d'instruction", instaurés par la loi de 2007, qui doivent entrer en fonction
en 2010. A quoi bon en effet regrouper en collège des juges d'instruction
voués à disparaître ?

Quant aux membres de la commission Léger, créée pour proposer une ixième
réforme de la procédure pénale, il ne leur reste plus qu'à mettre en forme
la décision présidentielle. Car dans la République impériale, l'axiome de
l'Ancien Régime est toujours vivant "Cy veut le Roi, cy fait la loi".

Il y a longtemps en France que le sort du juge d'instruction fait débat. Le
cumul de ses fonctions paraissait singulier : d'une part enquêter, d'autre
part rendre des décisions juridictionnelles qui touchent aux libertés
individuelles : à la fois Maigret et Salomon ! De tels pouvoirs réunis en
une même main appelaient des limitations. Diverses lois, notamment la
création du juge des libertés en 2000 par la loi Guigou y ont pourvu.

Pour pallier aux défauts révélés par des affaires retentissantes, nées de la
solitude du juge d'instruction, j'avais présenté en 1985, au Parlement, une
loi qui prévoyait que dorénavant les juges d'instruction oeuvreraient en
commun, au sein de chambres d'instruction réunissant trois juges. La loi fut
votée sans aucune opposition. Elle ne fut jamais mise en application, le
gouvernement suivant ayant affecté à d'autres fonctions les crédits
nécessaires. Vingt ans plus tard, après le désastre de l'affaire d'Outreau,
une commission parlementaire proposa de nouveau que l'on instaure la
collégialité de l'instruction. La loi de 2007 consacra ce principe. Elle
devait entrer en vigueur en 2010. Le choix présidentiel la voue au cimetière
sous la lune des projets enterrés.

Il est vrai que depuis dix ans, le juge d'instruction a vu se réduire son
domaine d'intervention. Il n'agit plus guère que dans les affaires
criminelles, ou des infractions financières, économiques, atteintes à
l'environnement, réseau de prostitution ou trafic de stupéfiants. L'enquête
sur ces affaires complexes serait conduite dorénavant par le parquet. C'est
seulement pour décider d'actes attentatoires à la liberté individuelle :
perquisitions, écoutes téléphoniques, détention provisoire, etc.
qu'interviendrait le juge. Clarté, célérité, seraient les bienfaits annoncés
de cette réforme. Nous en reparlerons quand le projet sera achevé.

Mais une question préjudicielle se pose. La première vertu du juge
d'instruction, c'est son indépendance. Magistrat du siège, il est à l'abri
de toute injonction du pouvoir politique. Toute autre est la situation des
membres du parquet. Corps hiérarchisé, organisé, indivisible, le parquet est
une institution puissante mais soumise à l'autorité du ministre de la
justice. Depuis 2004, cette autorité a été revendiquée avec toujours plus de
force par les gardes des sceaux. L'article 30 du code de procédure pénale
l'a consacré en 2004. Dès lors dans toutes les affaires "sensibles" confiées
au juge d'instruction, l'autorité du ministre pourra s'exercer par
l'intermédiaire du parquet, sur le cours de l'enquête.

Pour rassurer sur le risque de voir de telles enquêtes connaître un sort
particulier, deux tempéraments sont prévus. Le premier, singulier, est que
le parquet et la police judiciaire devront enquêter "à charge et à
décharge", comme le juge d'instruction. On croit rêver ! Le procureur n'a
pas pour vocation de contribuer à la défense du mis en cause. A ses avocats
de l'assumer. C'est dans l'égalité des parties, non dans la confusion des
rôles, que la procédure pénale, dans un Etat de droit, trouve son équilibre.

Reste l'autre argument : l'enquête du parquet se déroulera sous le contrôle
du juge de l'instruction, dénommé juge de l'enquête et des libertés. Les
actes atteignant les libertés individuelles seront soumis à l'autorisation
de ce magistrat du siège qui statuera en toute indépendance. Mais
qu'adviendra-t-il si le parquet sur instruction s'abstient de demander de
tels actes, par exemple des perquisitions ? Verra-t-on des personnes et des
lieux bénéficier d'une quasi-immunité pénale ? Sans doute les victimes
pourront demander ces investigations au parquet et en cas de refus saisir le
juge de l'enquête. Mais dans bien des cas, notamment de corruption, de
fraude, d'atteintes aux marchés publics, il n'y a pas de victimes
constituées parties civiles.

Si l'on décide d'aller vers la suppression du juge d'instruction, il est
indispensable que les magistrats du parquet voient leur condition
transformée. Je ne parle pas ici de l'organisation du parquet qui doit
rester un corps indivisible et hiérarchisé pour être efficace. Je vise les
dispositions indispensables pour assurer aux magistrats du parquet les mêmes
garanties statutaires en matière de nomination que les magistrats du siège.
Il faut au niveau de l'enquête comme à l'audience où la parole du procureur
est libre, qu'en toute conscience les magistrats du parquet puissent
accomplir tous les actes qui leur paraîtront nécessaires contre toute
personne ou demander aux juges de l'enquête l'autorisation de les accomplir.

La commission Delmas Marty, en proposant en 1987 la suppression du juge
d'instruction, avait posé comme condition préalable le renforcement des
garanties statutaires des magistrats du parquet. La réforme annoncée par le
président de la République reprend la voie ouverte en 1987. Mais le
préalable posé demeure. L'indépendance est au coeur de la fonction du
magistrat.

La Cour européenne l'a rappelé récemment à propos des membres du ministère
public français. Dès lors que l'on entend considérablement accroître les
pouvoirs des membres du parquet à l'encontre des justiciables, il faut
parallèlement accroître leurs garanties statutaires d'indépendance. A
défaut, le pouvoir aura renforcé par cette réforme son emprise sur la
justice pénale et les libertés individuelles.

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